Tapi au fond, tout au fond, il est là. Enfoui, profondément enfoui et tenu à distance derrière une porte blindée. Car oui, il dérange. Il ne peut être partagé et personne n’a envie d’en entendre parler. De temps en temps, il se trouve ébranlé, mais jamais suffisamment pour enfin émerger ou déborder. Puis, soudainement foudroyé, balayé par la digue qui a fini par céder, la porte s’étant fracassée, il s’engouffre dans notre réalité pour pouvoir enfin déferler, tel un volcan trop longtemps endormi.
Alors, comme un râle venu du plus profond de l’abîme, de violents sanglots trop longtemps étouffés se déchainent pour nous inonder par la soif d’exister et d’être écouté. Ce chagrin que nous ne savons point nommer, ce chagrin s’est révélé être une opportunité pour nous laver, nous purifier, nous régénérer. Car, s’il n’est point exprimé, le chagrin n’en finit pas de nous habiter et de nous submerger.
Le chagrin est une blessure qui demande de l’attention pour guérir. Afin d’aller jusqu’au bout de notre chagrin et de l’épuiser, nous devons affronter nos émotions dans un esprit d’ouverture et d’honnêteté, les exprimer, les libérer totalement et les accepter, quel que soit le temps que prendra notre blessure pour guérir. Nous craignons que le chagrin ne nous submerge si nous le reconnaissons. La vérité est que le chagrin dont on fait l’expérience se dissipe. Un chagrin non exprimé est un chagrin qui dure indéfiniment.
Qu’elle est donc cette impatience qui nous pousse à vouloir régler au plus vite ce qui dérange, à faire disparaitre ce qui dépasse du cadre bien lisse dont nous bordons notre existence ?
Mais trop souvent, et de façon tragique, les amis et la famille de la personne s’attendent à ce que celle-ci « revienne à la normale » après quelques mois. Cela ne fait qu’augmenter sa confusion et son isolement, car son chagrin persiste, et parfois même, s’intensifie.
Le chagrin est un passage nécessaire à toute transformation. Le chagrin nous rappelle qu’il nous faut exprimer la tristesse accumulée pour pouvoir lui donner une nouvelle forme, celle d’un nouvel élan de vie.
Laisser un commentaire